dimanche 22 janvier 2012

Dinosaurs of a Feather

Brian Switek

Le mois dernier j'avais publié un message sur le nouveau livre du BANDit Alan Feduccia. J'y avais bien évidemment souligner le fait que ce dernier n'avait de toute évidence aucun élément probant pour continuer à nier l'origine dinosaurienne des oiseaux et que donc son livre à venir serait probablement lui aussi vide de tout argument digne de se nom.

Or récemment l'excellent Brian Switek a publié sur son blog une revue du livre d'Alan Feduccia. Et comme je pouvais m'en douter Alan Feduccia ne semble effectivement rien à apporter d'autre que sa mauvaise foi pour continuer à nier l'origine dinosaurienne des oiseaux au mépris des multiples découvertes de dinosaures à plumes de ces quinze dernières années.

À ce titre j'en profite pour vivement recommander les deux blogs de Brian Switek à savoir Laelaps et Dinosaur Tracking.

lundi 2 janvier 2012

Deinonychus, un «oiseau de proie» du Crétacé?

Dans mes précédents messages j'ai eu l'occasion de parler de multiples dinosaures à plumes, y compris d'un clade de redoutables prédateurs à savoir le clade des Deinonychosauriens, comprenant lui même le clade des Dromaeosauridés, comprenant lui même le redoutable Deinonychus (voir arbre phylogénétique ci-dessous).

Arbre phylogénétique des Cœlurosauriens. En (18) nous avons l'embranchement des Deinonychosauriens et en (20) celui des Dromaeosauridés au sein duquel se trouve Deinonychus. Notons que cet arbre phylogénétique est susceptible de subir quelques modification pour plus de détail concernant ce dernier point vous pouvez vous référez à ce précédent message.

En 1969 déjà le célèbre paléontologue John Ostrom montra que Deinonychus possédait des caréctéristiques aviennes troublantes [1]. Et alors que l’apparentement des Dromaeosauridés avec les oiseaux devint certain dès les années 2000, l’on aurait pu penser, après avoir souligné que les Dromaeosauridés avait un système respiratoire hautement similaire à celui des oiseaux [2], qu’on ne pouvait guère être davantage surpris sur l’étonnante ressemblance qu’arborait cette catégorie de dinosaures avec nos amis à plumes contemporains.

Et pourtant Que nenni! Il semble que bien d’autres similitudes aviennes attendent d’être reconnue au grand jour chez ces animaux à plumes aujourd’hui disparus.

En effet une équipe de chercheurs vient de publier une étude sur l'anatomie de Deinonychus.

Cette étude revient sur l'anatomie de Deinonychus pour tenter de comprendre comment Deinonychus ainsi que les autres Dromaeosauridés comme Vélociraptor, chassaient et tuaient leurs proies.

Reconstitution de Deinonychus antirrhopus


La conclusion des chercheurs est élégante et remarquablement cohérente à la fois. Les Dromaeosauridés (Deinonychus, Dromaeosaurus, Vélociraptor, etc, etc.....) tuaient probablement leurs proies de la même manière que les oiseaux de proie actuels.

En effet les Droameosauridés possédaient en guise de deuxième orteil un doigt rétracté ne touchant pas sol surmonté d'une griffe en forme de faucille. Lorsque les Dromaeosauridés capturaient une proie ils pouvaient ainsi planter violemment leur griffe dans celle-ci.


Mouvement de la griffe lors de la capture de la proie

Cependant comment cela se passait-il dans les faits? Car même si la griffe des Dromaeosauridés est impressionnante elle n'aurait de loin pas forcément suffit à tuer la proie! Or c'est en comparant les Deinonychus aux oiseaux de proie actuels comme les Aigles que les chercheurs ont compris comment très probablement ces animaux disparus capturaient leurs proies et les tuaient. Et comme un image vaut souvent mieux qu'un long discours voici à quoi la capture d'une proie par un Deinonychus devait ressembler.

Deinonychus et les autres Dromaeosauridés devaient probablement sauter sur leurs proies puis immobiliser celles-ci à l'aide de leur puissante griffes (A) notamment de leur faucille du deuxième orteil qu'ils devaient violemment planté dans le corps de leurs victimes (B). Puis ils rabattaient leur membres antérieurs sur les côtés de la proie pour l'immobiliser (G). Ils pouvaient également battre des membres antérieurs à la manière des oiseaux de proies actuels pour se maintenir en équilibre sur une proie qui devait se débattre (F), les membres antérieurs emplumé servant donc à se maintenir en équilibre et à mieux maintenir la proie en place . Puis alors une fois la proie bien maîtrisée le Deinonychus n'avait plus qu'à commencer à la dévorer et si nécessaire à l'achever avec sa mâchoire (H).

Cette stratégie de chasse est parfaitement compatible avec l'anatomie de Deinonychus et des autres Dromaeosauridés. Car ceux-ci n'avaient en effet pas une mâchoire robuste, mâchoire dont la pression lors de la morsure n'était probablement pas suffisante pour que ces animaux s'attaquent à des proies en tentant de les chopper directement avec leurs gueules. En fait comme les oiseaux de proies actuels, dont la mâchoire a également une puissance limitée, les Dromaeosauridés devaient donc généralement capturer leurs proies via leurs membres postérieurs. Les membres antérieurs eux ne servant pas à déchiqueter la proie mais simplement à maintenir celle-ci et permettant au Dromaeosauridés de demeurer en équilibre sur sa proie. Une fois que cela fut fait il ne restait plus qu'à achever et à dévorer la proie en question.

Cette nouvelle étude sur Deinonychus a deux implications sur notre connaissance au sujet des Dromaeoasuridés et plus généralement des Deinonychosauriens.

La fin d’un «mythe»?

Tout d’abord cela pourrait remettre en question une «scène de chasse» bien connu des spécialiste des dinosaures à savoir celle d’une meute de Deinonychus attaquant un Tenontosaurus (dinosaure herbivore Ornithischien nettement plus grand que Deinonychus) comme le montre l’image ci-dessous.



En effet cette «scène de chasse» se base sur le fait que l’on a retrouvé à deux reprise, un fossile de Tenontosaurus entouré de plusieurs squelette de Deinonychus. Cela ayant poussé certains paléontologues à spéculer sur un possible témoignage de Deinonychus chassant en meute un Tenontosaurus. Or comme l’a souligné le paléontologue Andrea Cau, il est davantage probable que ces fossiles ne témoignent en réalité que de Deinonychus jouant les charognards sur un Tenontosaurus déjà mort.

Car ce que l’étude précédente souligne comme d’autres avant elle, c’est que Deinonychus n’était guère un prédateur muni par exemple, d’une mâchoire solide, arme généralement nécessaire pour s’attaquer à de grosses proies. De plus la méthode de chasse attribuée à Deinonychus par l’étude en question, tendrait à démontrer que les dits Deinonychus ne pouvaient pas s’attaquer à des proies considérablement plus grosses qu’eux.

Cependant il ne faut non plus pas là aller trop vite en besogne, car comme le souligne Ed Yong, Deinonychus pouvait peut-être s’attaquer à des proies relativement grandes. De plus on ne peut guère exclure le fait que Deinonychus chassait en meute à partir de cette étude.

Un indice sur l’origine évolutive du vol des oiseaux?

L’autre point important de cette étude sur les modalités de chasse de Deinonychus est ce que ces dernières pourraient nous fournir comme indice sur l’origine du vol des oiseaux. Comme cela a été vu plus haut les auteurs de l’étude ont conclu que Deinonychus et par extension les autres Dromaeosauridés, capturaient et tuaient leurs proies à la manière des aigles actuels. Et cette similitude dans la manière de capturer leurs proies comprenait également la manière de battre ses membres antérieurs pour se maintenir en équilibre sur la proie pendant qu’ils la serraient dans leurs membres postérieurs via notamment sa fameuse griffe en forme de faucille (voir l’image précédente). En effet cette technique de chasse est encore couramment employé par les oiseaux de proie actuels. Ci-dessous une vidéo d'un Épervier d'Europe (Accipiter nisus) usant de battements d'ailes pour se maintenir en équilibre et ainsi maintenir sa proie entre ses griffes.




Or selon les auteurs de cette étude ce mode de chasse consistant à user de ces membres antérieurs comme outil d’équilibrage via le battement de ceux-ci pourrait constituer une sorte de «prélude évolutif» au vol battu des oiseaux!

Bien évidemment les auteurs de l’étude sont conscient du fait que Deinonychus est un cousin et non l’ancêtre des oiseaux actuels. Tout comme ils sont conscients que les oiseaux ont du évolué à partir de dinosaures théropodes certes similaires à Deinonychus mais également probablement beaucoup plus petits et peut-être (probablement) pas avec une griffe en faucille hypertrophiée comme celle que possédait Deinonychus et les autres Dromaeosauridés. Mais donc les auteurs de l’étude affirment que les ancêtres communs des oiseaux et de Deinonychus pratiquaient déjà se mode de prédation avec battements des membres antérieurs pour maintenir la proie en place, ce mode de vie aillant donc pu selon les auteurs mener une partie de cette lignée de dinosaures ancestraux sur le chemin du vol battu.

Bien évidemment cette thèse de l’origine du vol des oiseaux via le battement des membres antérieurs pour maintenir une proie en place demeure extrêmement spéculative. Car autant l’étude de l’anatomie de Deinonychus et le mode de prédation attribué à ce dernier par les auteurs de cette étude, demeure des plus élégante et crédible. Autant leur hypothèse évolutive faite à partir de ces premières conclusions demeure sujette à caution.

Mais donc toujours est-il que cette étude nous montre que les redoutables Dromaeosauridés comme Deinonychus, Dromaeosaurus, Vélociraptor et bien d’autres encore, était probablement très similaires dans leur mode de chasse, aux rapaces actuels, en dépit du fait qu’il ne savaient pas voler.

Plus les découvertes et les recherches s’accumulent plus les dinosaures à plumes nous sembles proches des oiseaux. Si le fait de dire que les oiseaux sont des dinosaures peut changer la perception qu’ont certains de la gente avienne, ce serait plutôt la perception de bon nombre de dinosaures qu’il faudrait changer. Vous vous souvenez du sale gosse du début du premier film de la série des «Jurassic Park» disait que le Vélociraptor c’était juste comme une grosse dinde?


Eh bien devinez quoi le gosse n'avait pas tout à fait tort bien au contraire!

Références:

[1] John Ostrom (1969), Osteology of Deinonychus antirrhopus, an unusual theropod from the Lower Cretaceous of Montana, Peabody Museum of Natural History Bulletin 30: 1–165

[2] Jonathan R Codd, Phillip L Manning, Mark A Norell and Steven F Perry (2007), Avian-like breathing mechanics in maniraptoran dinosaurs, Proceedings of the Royal Society

[3] Denver W. Fowler et al (2011), The Predatory Ecology of Deinonychus and the Origin of Flapping in Birds, PLoS ONE